« Miracle » fait référence à une prestigieuse compilation de miracles réalisée à la fin du treizième siècle, dans le Nord de l'Espagne, au sein des royaumes de Tolède, Castille et Léon, sous le règne d'Alphonse X le Sage. Cette compilation a pour nom « Cantigas de Santa-Maria »¹.
CCCXXXXIIII ou « 344 » résulte d'une classification précise parmi un ensemble de plus de quatre cents chants dont les paroles alternent dévotions qui sont adressées à la Sainte Vierge et récits des miracles qui lui sont attribués.
Les miracles ont généralement pour objet de sauver des chrétiens d'épreuves qu'ils ne sont pas en mesure de surmonter seuls. Sont-ils malades, blessés, confrontés à de sinistres individus aux intentions peu catholiques, voire à des phénomènes surnaturels ou de diaboliques tentations, qu'ils s'en sortiront moyennant prières, dévotions et marques de générosité à l'endroit de la Vierge et plus encore des sanctuaires qui l'honorent.
Ces histoires au dénouement heureux ont notamment pour finalité d'encourager les pèlerins qui empruntent les voies qui mènent à Saint-Jacques de Compostelle.
La Vierge intervient également auprès de musulmans et de juifs, avec, pour conséquence du mauvais sort auxquels ils ont échappé grâce à elle, des conversions immédiates.
Ces conversions ne sont pas sans rappeler des volontés politiques quant à repousser ceux qui ont envahi toute la péninsule au début du huitième siècle et contre lesquels s'engage une « reconquista » qui ne s'achèvera qu'à la fin du Moyen Âge.
Mais les Maures savent se défendre et donnent du fil à retordre aux armées chrétiennes. C'est pourquoi en appelle-t-on aux puissances divines pour assurer toute victoire, ou, à défaut, pour créer d'efficaces propagandes.
Saint-Jacques quitte alors son humble vêture de pèlerin et sa coquille pour apparaître maintenant, bannière et épée ou lance à la main, tel un puissant chevalier sur un destrier d'une blancheur surnaturelle, terrassant ceux qu'il convient de chasser d'Espagne.
Ce récit de peu antérieur aux cantigas prétend illustrer la bataille de Clavijo qui se déroule en 844 et où l'apôtre vint en personne apporter son secours et offrir la victoire aux combattants chrétiens.
De tels récits donnent à penser que saint Jacques aurait renoncé au commandement « Tu ne tueras point », reniement que conforte le surnom de « matamore » - celui qui tue les Maures - dont il hérite au début de la Renaissance.
Singulièrement, parmi tous les cantigas, il est toutefois un miracle qui tient du miracle au cœur de cette évidente récupération géopolitique. Est-elle irritée par le rôle qui lui est prêté ? La Sainte Vierge intervient alors comme si elle tenait à montrer qu'elle n'entend pas être manipulée pour des enjeux terrestres, qui plus est, guerriers.
Ainsi, dans le chant numéroté 344, apparaît un récit unique, soutenu par une mélodie, elle aussi composée sur un mode inhabituel, où la Sainte Vierge répond étrangement à l'invocation d'une armée chrétienne qui désire parer à un assaut des Maures.
Os que a Santa María saben fazer reverença. macar se non amen eles. ela met' y aveença.
Ceux qui savent révérer Sainte marie, même s'ils ne s'aiment pas, elle sait les réconcilier.
La veille de la bataille, la Sainte Vierge amoindrit les sens des belligérants à tel point qu'ils s'installent les uns près des autres, à proximité d'une petite église, sans se voir ni s'entendre. Au matin, ils sont tellement surpris d'être si proches, qu'ils croient à un miracle. Au lieu de se battre, ils conviennent d'une trêve et repartent chacun de leur côté, non sans louer celle qui a su les réconcilier.
Muito s'en maravillaron des i treguas se pediron
Ils en furent tant émerveillés qu'ils décidèrent la trêve
Hervé Berteaux
La Gazette
Note :
¹ Ces précieux chants avec textes et musiques sont conservés dans quatre manuscrits enluminés.
Qui n'a pas rêvé d'être un jour ce chevalier, pourfendeur de dragons, héros des champs de batailles, combattant aguerrit, stratège et visionnaire, craint et aimé. Période de renouveau et de découvertes, précurseur des révolutions commerciales et intellectuelles, le Moyen Age est un formidable terrain de jeux pour qui sait s'ouvrir aux passions, aux grandes épopées, à l'engagement et à l'Histoire. Du roi Arthur aux Templiers, l'épée a toujours été le signe distinctif du Chevalier. Transmise de père en fils, offerte par le seigneur, dédiée à une cause, son symbole a traversé le temps pour arriver à vous aujourd'hui. Et parce que le Moyen Age ne se limite pas aux combats, laissez-vous embarquer dans la découverte d'ouvrages à feuilleter et de châteaux et de lieux à visiter.
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