S'il est un moyen de s'évader, voire de s'égarer plaisamment, c'est celui de la lecture des cartes, fussent-elles de papier ou désormais sur écran après numérisation.
Partons de Bordeaux et suivons Garonne¹ jusqu'à Cadillac. De là, en rive droite, quittons le fleuve pour remonter pendant quelques kilomètres le modeste ruisseau de l'Euille de manière à atteindre peu avant et en aval de la commune d'Escoussans, un lieu-dit en bord de rivière appelé « Larmurey » ou « Larmure » sur des supports plus anciens dont les premières cartes d'État-Major établies entre 1820 et 1866 (carte ci-contre).
L'appellation « Larmure » s'explique aisément à la seule lecture des minutes du notaire qui officiait en 1490, quand devant lui fut signée l'acquisition du lieu - comprenant moulin et logis - au profit du sieur Ambroise de Karoles, armurier de son état et originaire de Milan en Italie.
En cette fin de quinzième siècle, le métier d'armurier n'a pas le même sens qu'aujourd'hui car il ne concerne que la conception et la réalisation d'armures, lesquelles tiennent lieu d'équipement guerrier défensif et, pour les puissants, de tenue d'apparat dont les plus grands spécialistes œuvrent et forgent depuis plus d'un siècle dans les contrées milanaises.
Dans ses chroniques, Froissard cite le comte anglais Derby - futur roi d'Angleterre - à qui le seigneur de Milan envoie à Londres en 1397 quatre de ses meilleurs ouvriers en « quand le dit chevalier eut avisé et choisi toutes les armures tant de plates que de mailles ».
Le poète récidive dans une ballade où Milan et Bordeaux se côtoient.
Autre ballade de la malédiction sur ceux qui requièrent à faire armes
« De males dagues de Bordeaux
Et d'épées de Clermont
De dondaines² et de couteaux
D'acier qui a Milan se font
De croquepois³, de fer de lance,
D'archegaie⁴ qu'on jette et lance,
De fauchards, espadons⁵, guisarmes
Puist il avoir plaine sa pance,
Qui me requerra de faire armes. »
Dans la conception et la réalisation d'une armure, outre les exigences esthétiques, doivent être garanties au commanditaire, protection maximale, souplesse et dans une moindre mesure légèreté. Il en résulte un assemblage complexe de pièces métalliques, notamment pour limiter les points faibles que sont les articulations que l'ennemi ne manquera pas de viser et toucher, qu'il ait épée, dague, poignard, hache, masse ou fléau d'armes et autres délices médiévaux dont la sinistre miséricorde.
Au seizième siècle, les armures complètes seront progressivement allégées puis délaissées sur les champs de bataille.
Elles serviront encore pour l'apparat, notamment lors de joutes et tournois où il convient de faire bonne figure.
Hervé Berteaux
La Gazette
Notes :
¹ Point d'article devant le fleuve « Garonne » que ses riverains, encore aujourd'hui et depuis la nuit des temps, considèrent comme une personne, voire comme une divinité
² Machine pour lancer des pierres
³ Tranchant d'un côté, masse de l'autre
⁴ Petite lance de jet des archers
⁵ Grande et large épée
Qui n'a pas rêvé d'être un jour ce chevalier, pourfendeur de dragons, héros des champs de batailles, combattant aguerrit, stratège et visionnaire, craint et aimé. Période de renouveau et de découvertes, précurseur des révolutions commerciales et intellectuelles, le Moyen Age est un formidable terrain de jeux pour qui sait s'ouvrir aux passions, aux grandes épopées, à l'engagement et à l'Histoire. Du roi Arthur aux Templiers, l'épée a toujours été le signe distinctif du Chevalier. Transmise de père en fils, offerte par le seigneur, dédiée à une cause, son symbole a traversé le temps pour arriver à vous aujourd'hui. Et parce que le Moyen Age ne se limite pas aux combats, laissez-vous embarquer dans la découverte d'ouvrages à feuilleter et de châteaux et de lieux à visiter.
#Terressens est là pour vous accompagner sur ce chemin de découvertes, de passions et de Sens. Entrez dans notre Monde et rêvez avec nous.