« Seiner, om plus na vaut ne melz ne join […]
Cen mil chevalers maine en besoin, »
« Seigneur, aucun homme n'est aussi valeureux […]
Il mène cent mille chevaliers en guerre »
Extrait de la chanson de geste de Girard de Roussillon - mt d'Oxford vers 163 & 165
Ainsi les présente-t-on comme vaillants au combat, mais aussi courtois envers les dames.
« Sire sachiez, n'en doutez mie, que chevalier
N'aura jamais de grand renom sans bonne amour »
Extrait d'une chanson de Raoul de Soissons
Manuscrit de chants de trouvères, CH 389 folio 64v -Stadtbibliothek de Berne
« De cet honneur que je demande ici
Ensemble avec moi recevez le gant »
Extrait du Charroi de Nîmes - Geste de Guillaume d'Orange / FR 1449 folio 42v vers 601 & 602
« Ceux-ci répondent "Ainsi comme vous commandez !"
Ils revêtent les hauberts, lacent les heaumes gemmés
Ceignent les épées au pommeau d'or niellé »
« Montent en selle sur leur fougueux destriers
Au cou, pendent leurs solides boucliers
En leur poing, des lances niellées
De la ville sortent rangés et serrés
Devant eux font porter l'oriflamme
Tout droit vers Nîmes se sont acheminés.
Tant vit-on de heaumes étinceler ! »
Extraits du Charroi de Nîmes - Geste de Guillaume d'Orange / FR 1449 folio 43v44r vers 858 à 867
Les chevaliers sont le plus souvent représentés armés soit d'une épée, idéale pour les combats au corps à corps, soit d'une lance, laquelle permet de frapper à distance, avec toutefois le désavantage d'être plus lourde et donc plus difficile à manier.
Pour se défendre, ils portent bouclier ou écu, lequel a pour avantage de pouvoir mettre en exergue le blason des suzerains auxquels ils sont attachés, ce qui permet sur les enluminures des manuscrits originaux d'identifier les partis en présence.
Enfin se protègent-ils le corps par divers accessoires, principalement de métal, tels les heaumes pour la tête et hauberts ou harnois pour le reste du corps.
« Te serviront 3000 (soldats) vêtus de fer »
Extrait du Charroi de Nîmes - Geste de Guillaume d'Orange / FR 1449 folio 40v vers 321
Outre le handicap du poids de tout équipement fait de métal, s'ajoute celui consécutif à toute température extrême, comme les connaissent les chevaliers devenus croisés et qui se battent en Terre Sainte. Le problème se résout heureusement en partie en revêtant un surcot (sur cotte) ou tabar sur lequel sont, comme sur l'écu vu précédemment, affichées couleurs, armes et, terme en découlant, armoiries.
De fait, le tabar sert aussi pour l'apparat.
Indissociable de son cavalier, le cheval est également protégé par un caparaçon plus ou moins rembourré, assurément orné des mêmes parures que le bouclier ou le tabar.
De cet inventaire sommaire et donc incomplet de l'équipement du chevalier et des propos qui précèdent, déduit-on a minima deux questions. Qui et comment devient-on chevalier ? Et à quel prix ?
Ne deviennent chevaliers que des jeunes gens de noble souche ou vivant dans l'environnement d'un seigneur, lui-même très probablement chevalier ayant été adoubé. Attaché au service de son maître, le prétendant au futur titre de chevalier subit d'intenses entrainements, apprenant d'une part toutes disciplines militaires afférentes aux combats mais aussi toutes valeurs religieuses et courtoises. S'il advient que le jeune apprenti-chevalier obtient l'honneur de porter l'écu de son maître, parlera-t-on alors d'écuyer, terme dont l'étymologie est une fois encore plus qu'évidente.
Pour l'équipement qu'il se doit de posséder pour aller combattre, le chevalier se mesure régulièrement à d'autres pairs lors de tournois et joutes dont il espère victoires et plus encore récompenses financières directes ou indirectes parce qu'induites par la renommée qu'il en retire.
Corps d'élite reconnu, la chevalerie pâtit cependant des progrès de l'armement et des stratégies. Dès les premiers temps de la guerre de Cent Ans, ce ne sont plus forcément les chevaliers qui sont l'atout maître dans une bataille.
Apparaissent au sein des osts et armées de nouveaux corps de piétaille, appelés piquiers lesquels sont équipés de lances longues et acérées. Disposés en rangs serrés, tels des buissons d'épine, ces fantassins sont un obstacle majeur qui ralentit, voire bloque, toute charge des chevaliers. Ces piquiers sont précurseurs des hallebardiers de la Renaissance.
Mais le progrès qui affaiblit encore plus les chevaliers provient du développement des armes dites à distance.
À commencer par de grands arcs dont la portée et la précision sont telles qu'ils déterminent à eux seuls le sort de batailles dont la plus retentissante, au détriment des Français contre les Anglais, est celle d'Azincourt en 1415.
S'ensuivent l'apparition des armes à feu et le déclin rapide d'un corps d'élite qui reste cependant fort présent dans l'imaginaire collectif contemporain, bénéficiant encore et toujours de l'engouement des romantiques du XIXᵉ siècle pour le Moyen Âge et ses personnages les plus emblématiques dont les chevaliers.
« Tel fut Éviradnus. Dans l’horrible balance
Où les princes jetaient le dol, la violence,
L’iniquité, l’horreur, le mal, le sang, le feu,
Sa grande épée était le contre-poids de Dieu.
Il est toujours en marche, attendu qu’on moleste
Bien des infortunés sous la voûte céleste, »
Le chevalier Edviranus - La légende des siècles - Victor Hugo
Chemise, gambison, cotte de maille, tabard ou cape...
Calot, cervelière, heaume ou casque...
Épée à une main ou à deux mains...
Bouclier ou dague...
Finalement, est-ce l’équipement qui fait le chevalier ou est-ce le chevalier qui donne vie à son équipement ?
Même si au fil du temps les métaux ont évolué, même si les formes se sont modifiées, le symbole n'a jamais changé : préserver son combattant, combattre l'ennemi, appartenir à un clan ou une communauté mais surtout afficher haut et fort son identité !
Inventez-vous ou ré-inventez-vous si besoin, mais n'oubliez pas qui vous êtes.